Pourquoi je suis devenu réformé confessant

A partir du moment où j’ai découvert que l’intellect devait lui aussi être soumis à Dieu, et soumis en fonctionnant en toute soumission à Dieu, la question est vite venue: comment l’utiliser de la plus juste façon? Il ne suffit pas d’appliquer ses pensées à Dieu, puisque n’importe quel théologien progressiste en fait autant, et le résultat est tout de même monstrueux. La tradition évangélique disait: soumis à l’Ecriture seule.

Il suffit donc d’avoir l’Ecriture comme norme suprême et nous sommes sur le meilleur chemin possible pour faire de la théologie. Mais ce n’était que le début de mes questions. En effet, ce n’est un mystère pour personne: dans le milieu évangélique même, il y a quasiment un système doctrinal par personne. Certes, la diversité n’est pas aussi grande qu’on ne se l’imagine, elle est même moins grande que dans le monde romain, mais tout de même: parmi toutes ses doctrines « bibliques » laquelle est vraiment biblique? Comment le distinguer?

La première des étapes dans ce sens a été de distinguer clairement l’importance et l’impact de la Tradition dans nos interprétations. Quitte à m’auto-citer:

Le jour où j’ai compris la définition biblique du mot « tradition » (en interagissant avec des catholiques), je me suis rendu compte que beaucoup, beaucoup de choses étaient issues de la tradition. Même dans nos Églises évangéliques. À dire vrai, je me suis rendu compte que tout était tradition. […]Il y a deux erreurs très courantes dans cette démarche. Première erreur: « On n’est pas dans la tradition, notre enseignement est purement biblique ». Sauf que, comme j’ai dit, même si vous avez des raisons de le croire vrai, votre nouvel enseignement n’est pas «sans tradition» il est une tradition en lui-même. Vous venez donc de créer une nouvelle tradition tout en proclamant ne pas avoir de tradition.

Donc une bonne méthode théologique doit tenir compte que nous avons une tradition (contrairement aux réflexes évangéliques dans lesquels j’ai grandi). Et d’où la question: Puisqu’on ne peut pas échapper à la Tradition, comment l’intégrer au mieux, et surtout quelle est sa juste place?

Ensuite, il y a le rôle de la Raison. Il ne faut pas beaucoup de temps avant qu’on se rende compte qu’il y a un fossé entre ce que la Bible dit et ce que je comprends de la Bible et encore plus si l’on considère le système doctrinal que je développe à partir de la Bible. Il est très peu probable que ce que j’écris soit facilement récupérable par l’apôtre Pierre, suis-je donc en continuité? Je ne peux pas échapper à l’usage de ma raison, le simple acte d’interprétation de la Bible est un acte rationnel. Et non, il n’y a pas de « lecture sans interprétation ». Dès lors se pose le problème méthodologique suivant: Si on ne peut pas échapper à l’usage de la raison, comment puis-je l’utiliser au mieux et à sa juste place?

Ensuite, il y a le rôle de l’Histoire, et particulièrement de la théologie historique. Je ne m’en suis pas rendu compte tout de suite, mais quasiment aucun de nos enseignements ne sort tout frais de la Bible. La plupart du temps, ce sont des reformulations de développements de reformulations de doctrines qui ont été définies bien plus tôt dans le temps. Notre façon même d’utiliser la Bible pour défendre cette doctrine est un héritage de ces premiers enseignants qui ont formulé telle doctrine. Du coup il devient très important d’étudier la théologie historique, ou le comment les doctrines ont été formulées. Cela nous permet de savoir si l’intuition de départ était bonne, si les développement ultérieurs étaient valides, si la méthode théologique employée était bonne. Par exemple, la doctrine pentecôtiste du don des langues vient d’une confusion due à des sources académiques erronnées et les pères de l’église, ceux-là même qui pratiquaient le « don des langues apostolique » ont toujours compris ce don comme de la xenolalie (parler en langues humaines étrangères). Apprendre cela vous donne un recul certain sur votre propre tradition, et vous permet de mieux approcher la Bible, de plus près. D’où la question: comment prendre en compte mon héritage théologique lorsque je recherche la vérité biblique?

Ces quatre éléments: écritures, tradition, raison, héritage théologique sont inévitables, et une bonne théologie qui vise la vérité doit absolument tenir compte de ceux-ci et de comment ils interagissent entre eux. Quelle est donc la version de protestantisme qui a été la plus lucide sur ces éléments et qui a développé la meilleure méthodologie? Réponse: la théologie réformée confessante.

Parce que c’est la meilleure façon de faire de la théologie

Toutes ces questions ne sont pas venues d’un seul coup ni toutes avec la même force. L’usage de la raison est venue très tôt et très fort. La conscience du poids de notre héritage théologique plus tardivement, alors que je lisais les pères de l’église. La façon de gérer la tension entre Tradition et écriture est venu progressivement aussi, alors que je lisais différents livres de différentes traditions théologiques.

A présent, cela fait près de six ans que je ne lis que de la théologie et de la philosophie, et je peux dire avec assurance… que je suis un barbare et un ignorant. Mais j’ai eu l’occasion de voir que parmi toutes les écoles de théologie chrétienne, parmi toutes les façons de faire la théologie, il y en a une qui est meilleure que toutes les autres.

C’est l’école de théologie réformée confessante, représentée aujourd’hui par les presbytériens.

Ce sont eux qui, à mon sens, ont le meilleur équilibre entre Ecritures, tradition, raison et héritage théologique. Ils ont le mélange le plus sain. Evidemment, une telle affirmation ne peut pas être posée gratuitement voilà pourquoi je vais faire une série d’articles sur la méthode théologique de François Turretin, que je comparerais à ce qu’en dit Thomas d’Aquin (parce qu’après tout j’ai étudié Thomas) mais surtout avec la méthode théologique telle que je l’ai apprise en grandissant dans mon milieu évangélique. L’objectif est de la vulgarisation, pas vraiment de la défense.

Ensuite, je vais le dire en toutes lettres, histoire qu’il en reste témoignage:

J’adhère et confesse à la confession de foi de Westminster, en tous ses articles. Je suis réformé confessant.

 

4 commentaires sur “Pourquoi je suis devenu réformé confessant

  1. Tu abordes une question très importante dans l’interprétation de la Bible. Je crois qu’à cause de la disponibilité numérique de textes anciens aujourd’hui, la théologie historique est le meilleur cadre pour l’interprétation de textes problématiques où le sens commun ne peut pas appréhender.

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    1. J’ai souvent remarqué que pour les textes dont le débat exégétique est compliqué, très souvent la théologie historique vient grandement clarifier le tout^^

      I have noticed that for the texts wich are exegetically complicated, very often historical theology clarifies a lot. Thanks for your great work!

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